RAMSES : une mission pour la compréhension des astéroïdes géocroiseurs à des fins de Défense Planétaire

Terre & Univers

Patrick Michel, directeur de recherche CNRS au laboratoire Lagrange (CNRS/OCA/UniCA) s'est vu confier la direction scientifique de cette nouvelle mission spatiale pour l’ESA.

La mission RAMSES (Rapid Apophis Mission for SpacE Safety) est une mission de l’Agence Spatiale Européenne (ESA) menée en partenariat avec l’agence spatiale japonaise JAXA. Elle vient d’obtenir, lors du Conseil Ministériel de l’ESA du 27 novembre 2025, la dernière part de financement nécessaire à son lancement en 2028. La JAXA fournira le lanceur H3, les panneaux solaires de la sonde ainsi qu’un instrument scientifique.

Son objectif : explorer l’astéroïde géocroiseur (99942) Apophis lors de son passage exceptionnel à seulement 31 600 km de la Terre – soit 0,08 fois la distance Terre–Lune – le vendredi 13 avril 2029, un événement spectaculaire, sachant que la lumière de l’astéroïde sera visible à l’œil nu depuis nos régions sous un ciel clair, mais sans danger. Classé parmi les astéroïdes croisant l’orbite terrestre, Apophis offre une opportunité unique de comprendre les propriétés physiques et le comportement de ces corps qui reviennent régulièrement à proximité de notre planète. Une compréhension essentielle pour la Défense Planétaire, même si aucun astéroïde connu ne menace la Terre pour le prochain siècle au moins.

Avec un lancement prévu entre mi-avril et mi-mai 2028, RAMSES rejoindra Apophis en février 2029, deux mois avant son passage record. Elle étudiera non seulement l’astéroïde, mais aussi les transformations induites par les forces de marée terrestres : variations de rotation, de trajectoire, mouvements de surface ou réarrangements internes. A l’aide d’un cubesat qui sera déployé par la sonde à proximité de l’astéroïde, elle doit notamment déposer le premier sismomètre sur la surface d’un petit corps, permettant d’en étudier les propriétés mécaniques et internes. Un autre cubesat sera déployé pour évoluer à proximiter d’Apophis et sonder son intérieur avec un radar.

L’ambition scientifique est claire : mieux prédire la réponse des astéroïdes à des forces externes, y compris celles qu’un dispositif de déviation pourrait appliquer, offertes ici par les forces de marées de notre planète. Pour cela, RAMSES mesurera précisément la masse, la densité, la porosité, la cohésion interne et la structure géologique d’Apophis avant sa rencontre avec la Terre et comment ces propriétés évoluent pendant celle-ci. Autant de données cruciales pour élaborer des stratégies à long terme protégeant notre planète.

Une responsabilité locale

Patrick Michel, directeur de recherche CNRS au laboratoire Lagrange (CNRS/OCA/Université Côte d’Azur), travaille sur les missions vers Apophis depuis sa découverte : d’abord au CNES dans les années 2000, puis à l’ESA. Parallèlement, il est responsable scientifique de la mission Hera, actuellement en route vers l’astéroïde Didymos pour contribuer au premier test de déviation avec la mission DART de la NASA. Il assume également la responsabilité scientifique de RAMSES pour l’ESA. À travers cette nouvelle aventure internationale, il poursuit son engagement : comprendre toujours mieux les astéroïdes, et embarquer dans cette exploration un maximum de chercheurs – en particulier les jeunes – autour de défis scientifiques, techniques et humains passionnants.

En parallèle, d’autres missions rejoindront Apophis. La sonde japonaise DESTINY+, lancée avec RAMSES sur le même H3, effectuera un survol de l’astéroïde quelques semaines avant l’arrivée de RAMSES, fournissant un premier aperçu de sa forme et de son environnement avant de poursuivre vers (3200) Phaéton. La mission OSIRIS-REx, désormais OSIRIS-APEX, entamera quant à elle une visite de dix mois après le passage rapproché d’Apophis, séjournant quelques temps en même temps que la mission RAMSES autour de l’astéroïde puis la relayant dans une campagne d’observation continue. Un groupe de coordination international comprenant les agences spatiales et les responsables de ces missions est chargé d’assurer la cohérence scientifique et opérationnelle de ce dispositif inédit.

Clôturant sa phase d’observation en août 2029, RAMSES marquera une étape décisive dans l’étude des astéroïdes géocroiseurs. Succédant à Hera – dont elle reprend l’architecture de la sonde et de ses deux cubesats déployés à proximité d’Apophis – elle place l’ESA en première ligne pour la caractérisation de ces objets, avec deux missions successives offrant notamment les premières études détaillées de leur structure interne, au cœur d’une expertise française reconnue mondialement.

À travers RAMSES et ses missions partenaires, les agences spatiales unissent leurs forces : ingénieurs et chercheurs démontrent leur capacité à anticiper et relever les défis de la Défense Planétaire, tout en perçant les mystères des petits corps de notre système solaire.

Contact

Patrick Michel
Directeur de recherche CNRS Laboratoire J.-L. Lagrange
Julien Serrrecourt
Chargé de la communication & des relations publiques CNRS auprès du Dr. Patrick Michel